• - MGR TOMASI À L'ONU

    Intervention de Mgr Tomasi à l’ONU

     

    - MGR TOMASI À L'ONU

    Mgr TOMASI

     

    Rome, 9 octobre 2015 (ZENIT.org)

     

    « La priorité politique demeure la nécessité de sauver des vies », déclare Mgr Tomasi.

     

    Mgr Silvano M. Tomasi, représentant permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, est en effet intervenu lors du « Débat général de la 66ème session du Comité exécutif du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) », à Genève, hier, jeudi 8 octobre 2015.

     

    « La priorité politique demeure la nécessité de sauver des vies. Ensuite, l'obligation juridique découlant des traités doit être honorée. La situation d'urgence actuelle exige également que la gouvernance mondiale des mouvements de population soit plus efficacement coordonnée » déclare Mgr Tomasi qui rappelle les crises précédentes vécues par l’Europe, depuis les Hongrois de 1956 en passant par les « boat-people ».

     

    Mais il avertit : « Hier comme aujourd’hui, les causes de tant de souffrances sont les mêmes : guerres, persécution, politiques d’oppression, discrimination, tyrannie et extrême pauvreté. »

     

    Pour trouver des solutions, il recommande « une réflexion innovatrice, en gardant à l’esprit les situations du passé ».

     

    Voici notre traduction intégrale de l’intervention de Mgr Tomasi.

     

    A.B.

     

    Allocution de Mgr Tomasi

     

    Madame la Présidente,

     

     Aujourd'hui, comme cela a déjà été souligné, plus de 60 millions de personnes ont été forcées de quitter leur maison. C’est une période de crise exceptionnelle qui voit des gens persécutés, victimes de guerre, ou obligés de quitter leur pays d'accueil car ils sont sans espoir. Le cas de la Syrie est un exemple très dramatique de cette situation.

     

    La Convention de 1951 stipule clairement que les réfugiés sont une responsabilité commune de la communauté internationale. Peu à peu, cependant, cette responsabilité s’est déplacée vers les pays d'accueil dans le monde en voie de développement malgré leurs moyens limités. Ils continuent de porter leur fardeau avec l'aide financière de donateurs. Bien des fois, l'aide combinée est insuffisante et les réfugiés se trouvent dans des situations délicates très difficiles. Néanmoins, la proximité géographique ne définit pas la responsabilité. De nombreuses puissances déstabilisent les pays d'origine des demandeurs d'asile et elles devraient, par conséquent, assumer la responsabilité des conséquences de leurs actes.

     

    Les réfugiés syriens et d’autres demandeurs d’asile arrivent maintenant en Europe par des voies désespérées qui font de nombreuses victimes en mer et sur terre. Cette année, à ce jour, environ 3000 demandeurs d’asile et migrants se sont noyés en Méditerranée où ils sont engloutis avec leurs rêves d’une vie plus digne. Ils arrivent directement de zones de conflit, ou ils quittent des situations sans espoir et sans perspective d’avenir. Ils fuient l’extrême pauvreté et la violation systématique de leurs droits humains. Les communautés d’accueil sont sous pression.

     

    Les programmes humanitaires restent sous-financés. Les demandeurs d’asile ne peuvent pas employer les transports normaux puisque les entreprises de transport veulent voir les papiers exigés par les pays de destination ; ils n’ont pas ces papiers et, en fait, ils n’ont pas besoin de les avoir. L’accès au territoire européen pour faire une demande d’asile est donc devenu quasiment impossible. Il en résulte que d’immenses sommes sont payées aux passeurs. Les visas humanitaires seraient une solution. On pourrait même envisager la levée des sanctions pour les transporteurs. Les demandeurs d’asile pourraient alors arriver sains et saufs en Europe sans risquer leur vie.

     

    L’augmentation du nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés est un défi pour l’Union européenne. Des mesures ont été prises pour transférer les demandeurs d’asile et pour fournir de nouveaux dons. Si admirables qu’elles soient, ces mesures ne sont qu’un premier pas. Un programme parallèle est aussi en place : renforcer les frontières et essayer d’empêcher les gens d’arriver. La question demeure de savoir si les obligations de l’Union européenne à l’égard des réfugiés seront mises à la première place ou si la sécurisation des frontières aura le dessus.

     

    On peut craindre que trop de personnes frappent à la porte de l’Union européenne et de ses 28 pays. On argumente que trop de pression serait mise sur les structures et les sociétés de l’Union européenne et qu’il vaudrait mieux installer les réfugiés dans leur région d’origine. Toutefois, une perspective d’ensemble est nécessaire. La plupart des réfugiés sont, en fait, dans leur région d’origine, dans les pays voisins comme le Liban, la Jordanie et la Turquie. Des informations plus précises et une couverture plus équilibrée dans les médias dissiperaient les craintes infondées et soutiendraient la volonté politique nécessaire pour montrer une solidarité concrète dans la résolution des difficultés actuelles.

     

    La priorité politique demeure la nécessité de sauver des vies. Ensuite, l'obligation juridique découlant des traités doit être honorée. La situation d'urgence actuelle exige également que la gouvernance mondiale des mouvements de population soit plus efficacement coordonnée. Cette situation d'urgence n’est pas nouvelle. Malheureusement, à intervalles réguliers, le monde doit assister à des situations d'urgence de réfugiés. En 1956, 220.000 Hongrois sont entrés en Autriche en trois semaines. En 1975, la fin de la guerre du Vietnam a causé plus d'un million de réfugiés, « boat people » et autres, qui cherchaient un refuge. Les guerres d’indépendance ou civiles au Mozambique, au Congo et en Angola ont produit des millions de réfugiés. Dans les années 90, lorsque l’accord de paix fut signé pour mettre fin aux guerres des Balkans, plus de 3 millions de personnes de cette région furent déplacées : on estime à 1,3 million les personnes déplacées à l’intérieur du pays, environ 500.000 réfugiés ont fui dans les pays voisins et quelque 700.000 réfugiés étaient en Europe occidentale. Ailleurs, il y a de nouveaux « boat people » cherchant un lieu d’accueil. Hier comme aujourd’hui, les causes de tant de souffrances sont les mêmes : guerres, persécution, politiques d’oppression, discrimination, tyrannie et extrême pauvreté.

     

    La communauté internationale ne peut pas se permettre de continuer sur cette voie. Il faut entreprendre une réflexion innovatrice, en gardant à l’esprit les situations du passé, à travers des initiatives comme la Conférence internationale sur l’aide aux réfugiés en Afrique (IARA I et II) ou les Consultations mondiales sur la protection internationale. Il faut surtout s’attaquer aux causes profondes des déplacements forcés en assurant la paix et le développement durable, les deux pistes sur lesquelles s’ouvre un avenir sans demandeurs d’asile.

     

    En ce moment crucial où des décisions pratiques doivent être prises d’urgence, les paroles que le pape François a adressées aux représentants politiques américains et européens montrent opportunément la voie à suivre :

     

    « Notre monde est confronté à une crise de réfugiés d’une ampleur inconnue depuis la Seconde Guerre Mondiale. Cette crise nous place devant de grands défis et de nombreuses décisions difficiles… Nous ne devons pas reculer devant leur nombre, mais plutôt les voir comme des personnes, en les regardant en face et en écoutant leurs histoires, en essayant de répondre le mieux possible à leur situation… d’une manière toujours humaine, juste et fraternelle. Nous avons besoin d’éviter une tentation fréquente de nos jours : écarter tout ce qui s’avère difficile. »

     

    « L’Europe sera en mesure de faire face aux problématiques liées à l’immigration si elle sait proposer avec clarté sa propre identité culturelle… si elle sait adopter des politiques justes, courageuses et concrètes qui aident leurs pays d’origine dans le développement sociopolitique et dans la résolution des conflits internes – cause principale de ce phénomène – au lieu des politiques d’intérêt qui accroissent et alimentent ces conflits. Il est nécessaire d’agir sur les causes et non seulement sur les effets. »

     

    Madame la Présidente, permettez-moi d’ajouter un mot de remerciement au haut-commissaire António Guterres ; ses qualités de dirigeant, son humanité, sa détermination, sa compassion ont marqué son service, nous ont inspiré et ont fourni une protection et une aide efficaces à des millions de personnes déracinées. Ma délégation lui souhaite bonne route et un heureux avenir.

     

    Je vous remercie, Madame la Présidente.

     

    © Traduction de Zenit, Constance Roques

     

     

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