• - PAULINE JARICOT

     

     

    - PAULINE JARICOT

    Pauline Jaricot (1799-1862)

     

    ( Demain dimanche, c'est la "Journée des MISSIONS". A cette occasion, voici un précieux témoignage de la petite nièce de Pauline JARICOT, cette Lyonnaise qui se dédia entièrement à la cause des Missions: elle fonda notamment l'Ouvre de la "PROPAGATION DE LA FOI". Elle fut déclarée "vénérable par le Pape Jean XXIII)

     

    Du désespoir à l’amour : La conversion de Pauline

     

     

    A la veille de la fête de Pauline Jaricot, la rédaction du site internet a recueilli le témoignage de sa petite-nièce, ermite dominicaine dans le diocèse de Gap. Sœur Marie-Monique de Jésus, o.p., relate ci-dessous l’histoire de la conversion de Pauline.

     

    Pauline-Marie Jaricot a beaucoup écrit durant sa vie. Parmi ses écrits de jeunesse, elle nous a laissé l’Histoire de ma vie, rédigée à la demande de son confesseur, monsieur l’abbé Wurtz, alors qu’elle n’avait pas encore vingt-cinq ans.

    Elle évoque sa conversion.

     

     

    Issue d’une famille de soyeux lyonnais, profondément chrétienne, après une enfance fervente, lors de son adolescence elle tombe dans une certaine tiédeur et mène une vie chrétienne médiocre.

     

    Jeune, jolie, coquette, fortunée, ayant un cœur ardent et passionné, elle se laisse séduire par les illusions du monde. Elle est prise dans l’engrenage d’une vie facile et quelque peu mondaine.

     

    "Lorsque mon cœur palpita pour le monde, il cessa de palpiter pour le Seigneur… Pauvre cœur ! tu n’étais créé que pour Lui… et tu n’en as pas profité !..." écrit-elle.

     

    Mais, ajoute-t-elle, un esprit droit, un cœur qui n’a jamais connu et aimé que Dieu seul, serait incapable de comprendre la force des illusions du monde pour ceux qui s’y sont une fois laissé prendre.

     

    Et elle se laisse prendre…

     

    Elle s’installe dans un état de médiocrité dont elle n’arrive pas à sortir. Lâche par rapport à ses devoirs, séduite par un monde qui la flattait, la vanité s’empare de son cœur. "Toutes mes actions étaient faites pour plaire. Je voulais régner sur tous les cœurs." Elle ne veut accomplir strictement que ce qu’exige la loi morale sans rien accorder à l’amour de Dieu. Autrement dit, elle réduit la religion à une morale en en évacuant la dimension la plus profonde. Elle reste à la surface, en deçà de l’amour, sans comprendre que la morale n’est que le soubassement, le tremplin pour établir une relation vivante avec Celui qui nous aime.

     

    Elle est partagée : elle désire bien recevoir le Seigneur (par la communion) pour ne plus se séparer de lui, mais elle ne cherche pas à prévoir les occasions de chute ; notamment elle ne renonce pas à certaines choses qui n’étaient pas défendues en elles-mêmes mais qui étaient des causes de danger ou de refroidissement, elle ne renonce pas à certaines affections mondaines…

     

    Il en résulte que les ténèbres de son esprit devinrent si épaisses qu’elle ne distinguait presque plus le vice d’avec la vertu… "Je croyais voir enfin les choses telles qu’elles étaient, et mes anciens désirs de vertu ne me paraissaient qu’un tas de scrupules et de bêtises".

     

    De plus elle abandonne la prière.

     

    "Justes ou pécheurs, nous ne pouvons sans témérité, cesser de prier ce bon Maître… Oh ! si l’on pouvait ouvrir les enfers et interroger les réprouvés, écrit-elle, combien en verrait-on qui ne sont tombés dans les prisons de l’éternité que pour avoir cessé de prier. Justes, priez, et priez sans cesse".

     

    Cependant, tout au fond d’elle-même, elle n’est pas heureuse. La vie facile, voire luxueuse, qu’elle mène – ni même une idylle qui s’ébauche – ne comble pas ce cœur que Dieu avait créé aimant.

     

    "Ce pauvre cœur qui… était vide d’amour et d’affection, n’était pas heureux. J’éprouvais une soif que rien ne pouvait calmer, rien n’apaisait l’ennui qui me poursuivait en tous lieux… Je n’éprouvais aucun plaisir de la part du monde, et aucune consolation de la part de Dieu, parce que je n’étais ni au monde ni à Dieu… Je désirais le néant et je maudissais le présent de mon existence… Je cherchais avec avidité quelque chose qui pût combler l’immensité de mon cœur".

     

    L’appel de Dieu est là. Car ce goût de néant, de mort, ce goût amer de tout le créé n’est que le revers d’un appel de Dieu. C’est la brèche, la fissure par laquelle va pouvoir s’infiltrer la grâce. Rien n’est pire, en effet, pour la créature spirituelle appelée à vivre en enfant de Dieu que de s’enliser dans des plaisirs ou des choses d’ordre matériel.

     

    Mais Dieu respecte la liberté de sa créature. Il faut savoir et vouloir saisir son appel.

     

    Or, Pauline le fuit.

     

     

    Pourtant Dieu la poursuit sans cesse : "Vous me cherchiez sans relâche et je vous fuyais sans repentir". Elle ressent confusément ses infidélités, mais elle passe outre. Dieu lui donne des signes de son amour, mais elle ne se rend pas. Il lui envoie un avertissement : le tableau qui lui rappelait sa première communion tombe du mur et se brise. Elle reconnaît ce signe mais il lui fallait des coups plus forts pour la reconduire au bercail du Bon Pasteur. La maladie ne suffit pas non plus pour la ramener vers Dieu. "Et pourtant ce Dieu Sauveur ne s’est point lassé de mes résistances… Je continuais de le fuir et il ne se lassait point de me chercher. Car c’est Lui qui nous a cherchés quand nous croyons l’avoir trouvé". Plus tard, il lui dira : "Ingrate fille, tu ne comprenais pas que mon amour était désespéré quand tu me fuyais".

     

    Pauline est divisée intérieurement, elle se rebelle, elle combat :

     

    "Le combat de moi-même contre moi-même dura quelques mois et je puis dire qu’il me rendit bien malheureuse… mon pauvre cœur ne goûtait plus de repos."

     

    Le Seigneur cependant lui murmure :

     

    "C’est en vain que tu cherches hors de moi un remède à tes peines, je ne t’en accable que pour te punir d’avoir oublié ma tendresse… Tu ne trouveras du repos qu’en te tournant de mon côté, qu’en avouant ta faute, qu’en recourant à mon amour. Tant que Jésus ne sera pas ton unique espérance, tant que tu ne retourneras pas à sa bonté… tu souffriras des maux que tu as justement mérités par tes infidélités et ton ingratitude".

     

    Elle se pose des questions :

     

    "Je me disais tristement à moi-même : S’imagine-t-on que j’ai quatre- vingt ans pour me faire couler une vie si monotone ! O que ma vie est ennuyeuse ! que ma jeunesse est triste ! Mais cette réponse intérieure m’était faite : « Quand tu auras perdu ton temps à danser, que t’en reviendra-t-il ? ne sais-tu pas que la plus noble partie de toi-même est immortelle ? que le reste doit mourir ? »… Il faut mourir, me disait la voix de la vérité, et si tu meurs, quelle sera ta destinée ? Où ira ton âme immortelle ?"

     

    Elle est torturée.

     

     

    Il faut compléter ce récit de "l’Histoire de ma vie" par d’autres textes. Le coup décisif qui fixa définitivement son orientation ce fut un sermon entendu en l’église Saint-Nizier, sa paroisse à Lyon. Alors qu’elle était tourmentée intérieurement, sa sœur aînée, Sophie, lui dit : « J’ai entendu un saint. » Pauline répond : « Justement, j’ai besoin d’entendre un saint. »

     

    C’était un dimanche de carême en l’an 1816. Pauline a dix-sept ans. Plus élégante que jamais elle se rend à sa paroisse de Saint-Nizier où monsieur l’abbé Wurtz, vicaire de la paroisse, prêche sur la vanité. Pauline est ébranlée. Après le sermon elle s’engouffre dans la sacristie et questionne : « Qu’est-ce que la vanité coupable ? » L’abbé Wurtz la regarde un instant et lui dit : « Mon enfant, pour la plupart des femmes, cette vanité consiste à se parer afin d’attirer les regards, et devenir l’idole des créatures… Pour d’autres, elle est tout entière dans l’amour de ce qui retient le cœur captif, quand Dieu l’invite à s’élever bien haut. » Pauline tout émue murmure : « Mon Père, voulez-vous me confesser ? »

     

     

    Le mouvement de conversion était déclenché. Il va transformer sa vie. Comme saint Paul sur le chemin de Damas, dira-t-elle, elle a été terrassée par l’amour de Dieu. Elle note qu’à ce moment-là, éclairée par une lumière divine, elle a entrevu tout à la fois la mort, qui "malgré moi deviendrait le terme de tous mes plaisirs, l’enfer qui en serait la punition, la miséricorde de Dieu qui m’attendait encore et qui était prête à pardonner tous mes égarements".

     

    Alors, vaincue par la force de l’amour, son désespoir se change en conversion.

     

    Et tout change à ses yeux. Alors qu’auparavant la piété de son enfance était le sujet de ses railleries car elle croyait voir les choses telles qu’elles étaient, et que ses désirs de vertus ne lui paraissaient qu’un tas de scrupules et de bêtises, maintenant Dieu éclaire les ténèbres de son esprit. Elle voit tout sous une autre lumière. Elle cherche Dieu partout, et elle le voit partout. Elle ne cherche plus qu’à plaire à Celui qu’elle veut suivre et aimer uniquement.

     

    La foi est une lumière intérieure surnaturelle qui non seulement nous fait connaître Dieu en lui-même, mais c’est une lumière qui nous éclaire sur nous-même et sur le monde. Elle nous fait porter un regard autre sur toutes les réalités de la vie quotidienne. L’esprit de Pauline est éclairé intérieurement par cette lumière surnaturelle.

     

    Son cœur aussi est purifié, changé :

     

    "Je sentais que mon cœur, autrefois si immense que les créatures et le monde entier ne pouvaient le remplir, était devenu trop étroit, trop borné dans ses ardeurs pour aimer à son gré l’Etre infiniment aimable..."

     

    Pauline a trouvé le vrai bonheur en trouvant Dieu.

    Elle a dix-sept ans.

    Sa vie ne sera plus qu’une longue montée vers Dieu.

     Immédiatement après sa conversion, avec une générosité sans pareille, elle rompt avec ses habitudes. "Je pris le parti extrême, dit-elle, car il m’était si terrible de briser avec mes habitudes de luxe et de richesse que, les premiers mois de ma conversion, je souffrais cruellement quand je me montrais en public". Elle s’habille en ouvrière, en violet, couleur qu’elle abhorre. A tel point que son frère lui dit : « Tu prends le bouillon trop chaud, Pauline, vas-y avec plus de mesure. » Mais non, rien n’est trop difficile, ni trop grand pour Celui qu’elle aime. Tel est le secret de l’amour : il suffit d’aimer.

     

    Elle va recevoir d’abondantes grâces contemplatives, dont elle parle dans ses cahiers, à la mesure de la sainteté à laquelle elle était appelée et de la mission qu’elle aurait à accomplir dans l’Eglise.

     

     

    Bien au-delà d’une simple histoire personnelle, chacun, à travers ces lignes émouvantes, aux accents augustiniens, peut trouver un écho à ses propres interrogations, à ses inquiétudes, à sa souffrance secrète, et aussi à ses combats. L’aventure de Pauline n’est-elle pas celle de tout être humain ? chacun de nous n’est-il pas interpellé par Dieu ? et chacun de nous n’est-il pas en quête d’un bonheur vrai et durable qui puisse donner un sens à sa vie ?

     

    Et l’histoire de Pauline peut susciter la réponse, une réponse toujours vraie, toujours actuelle :

     

    Pouvoir aimer sans mesure, sans remords, sans interruption, sans crainte, voilà ce que je cherchais sans m’en douter, et voilà ce que je n’ai pas trouvé hors de Vous ; mais, en Vous, j’ai rencontré la paix, le repos et l’amour payé par un plus grand amour. Oui, mille et mille fois plus grand amour, par un amour infini.

     

    Mais est-il possible aujourd’hui de découvrir et d’atteindre cet Absolu, difficilement discernable en raison du matérialisme environnant ?

     

    Qui que vous soyez, faites comme Pauline, croyez à l’Amour. A l’Amour qui vous a aimés le premier de toute éternité et qui veille continuellement sur chacun de nous pour nous donner le vrai bonheur ici-bas, en attendant une éternité de bonheur. J’ai reconnu qu’il n’est point de bonheur hors de Jésus-Christ… Le monde paraît d’abord enchanteur, mais il cache soigneusement l’épine sous les fleurs.

     

    Si vous ne croyez pas à la possibilité d’une conversion radicale, parce que c’est trop difficile et que cela dépasse totalement vos forces, Pauline vous donne la clé :

     

    "Me convertir me parut impossible tant que je ne voulus envisager que les épines du chemin, au lieu de tourner mes regards vers le bonheur réel que l’on goûte au service du Seigneur".

     

    Si parfois vous vous sentez envahis par le découragement, voire le désespoir, regardez Pauline. Elle a fait cette expérience. Elle vous montre la voie. Ayez confiance. Dieu est plus grand que tout. Il vous suffit d’avoir pour toute richesse votre bonne volonté avec le désir sincère de revenir à Dieu, et le Seigneur lui-même vous portera. Est-il difficile d’avancer lorsqu’on vous porte ? Et évoquant son passé, elle ajoute : "C’est vous, Seigneur, qui avez renversé seul toutes les idoles de mon cœur, elles sont tombées devant vous comme les murailles de Jéricho".

     

    Si vous ne savez pas prier ou si vous n’osez plus le faire car vous vous sentez trop loin de Dieu, Pauline vous répète :

    "Quelle folie ! le pécheur n’ose plus prier… Or, la prière triomphe de tous les dangers… elle remporte toutes les victoires".

     

    Si vous craignez de perdre votre liberté, sachez que le joug du Seigneur est doux et léger pour celui qui veut le porter entièrement, mais il ne paraît lourd et insupportable que pour les cœurs partagés.

     

    "O miséricorde infinie de mon Dieu ! à peine ai-je fait à son amour plusieurs petits sacrifices que mon cœur devient courageux pour tout lui immoler… Que peuvent être à mes yeux tous les biens de la terre lorsque mon Dieu remplit mon cœur ?"

     

     

    Sœur Marie- Monique de Jésus o.p. +

     

     

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